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À l’heure de l’IA, stimulez votre IN !

Un pied dans ma cinquième décennie depuis peu. Né avant la dernière grande (r)évolution techno-industrielle qui n’en finit pas de nous faire voyager dans le futur. Bercé par les grands classiques du cinéma de science-fiction, je regarde le monde nourrir toujours d’avantage les fantasmes que ces prophéties autoréalisatrices ont fait naître dans mon esprit désormais dépassé.

Aujourd’hui c’est l’IA qui fait le plus de bruit et qui imprègne de son atmosphère notre actualité bondissante. Elle était cachée depuis des lustres dans chaque microprocesseur, comme attendant, patiemment, sa véritable heure de gloire. Ça fait un petit moment que ça a commencé, mais là on y est, au plus fort de son évolution. Jour après jour elle donne toujours plus d’espace à l’altérité digitale, cet autre virtuel, ton coach, ma meilleure amie, son petit ami, le vrai, le faux on ne sait plus et puis il y a le business qui mène trop souvent par le bout du nez, nos idéologies de façade et nos innovations progressistes. Et le business, à cette échelle et cette expansion, ça m’inquiète.

Entre fascination et sidération, entre peur et stupéfaction, j’avais besoin de l’avis d’un expert. Surement pour me rassurer et surtout pour appréhender un sujet avec plusieurs angles de vue, notamment celui de la bonne distance, de la prise de recul. J’ai pris rendez-vous avec Pierre. Il est mon plus proche acteur du digital, artisan du numérique, un savant geek passionné et passionnant. Alors, un matin de mars dans sa cuisine, autour d’une eau chaude, je lui ai posé mes petites questions de candide. Quelles transformations cette nouvelle étape de notre évolution va engendrer sur les cerveaux, sur notre matière grise, sur nos sociétés et nos rapports humains ? Et comme à chaque fois que l’on dialogue à ce sujet, la première réponse fuse en forme de préambule : c’est complexe. Ah chère complexité, chère humanité que l’on ne peut pas réduire à une seule vision, à une seule sentence.


Pierre: « Gérome, c’est en effet un domaine complexe. L’IA peut transformer positivement tant de secteurs, notamment la médecine, en améliorant et en accélérant les diagnostics et les traitements. Mais comme le souligne Asma Mhalla, il existe un risque réel que ces technologies puissent aussi menacer la « liberté de l’esprit ». La vigilance cognitive que tu évoques est essentielle; nous devons être constamment attentifs à la manière dont nous interagissons avec et dépendons de l’IA. »

Gérome: « Rester vigilant oui, mais avec l’augmentation des capacités de l’IA, comment nous assurer de ne pas perdre de vue l’importance de l’intelligence naturelle, notamment l’esprit critique et l’intelligence émotionnelle ? »

P: « C’est là que le débat entre le potentiel et les risques de l’IA devient particulièrement pertinent. Evgeny Morozov a mis en garde contre le solutionnisme technologique, qui tend à voir la technologie comme une panacée. Notre défi est de maintenir un équilibre, utilisant l’IA comme un outil pour améliorer les capacités humaines sans les remplacer. Nous devons exploiter l’IA pour augmenter nos processus mais rester critiques quant à ses applications et impacts. »

G: « Exactement car le déséquilibre pourrait potentiellement engendrer une atrophie de notre culture collective. Les outils de l’IA, accessibles à tous, pourraient diminuer la valeur de l’apprentissage humain profond et des interactions réelles. »

P: « En effet, et c’est pourquoi nous devons intégrer l’IA de manière à ce qu’elle complète et non qu’elle remplace l’interaction humaine. Les outils comme ChatGPT-4 ou DALL·E sont incroyables, mais ils doivent être utilisés pour renforcer notre compréhension et non pour créer une dépendance. »

G: « Je suis d’accord. La manière dont nous intégrons l’IA dans nos pratiques éducatives et professionnelles doit être méticuleusement réfléchie. Nous devons cultiver une société qui valorise la collaboration, la coopération et la croissance partagée par l’intelligence collective, plutôt que la compétition. »

P: « C‘est un travail continu. Nous devons rester des apprenants et des éducateurs, des formateurs, des enseignants vigilants, prêts à intégrer de nouvelles technologies tout en préservant et en valorisant ce qui nous rend humains. C’est notre plus grand défi et, sans doute, notre plus grande opportunité. »

G: « Oui, l’avenir de l’IA, c’est comme tout : ni tout noir, ni tout blanc. L’IA est ce que nous en faisons et d’autant plus ce que nous en ferons. À chacun.e la responsabilité de modeler cette technologie pour qu’elle enrichisse la société et non qu’elle ne la dépouille de son humanité. C’est un équilibre délicat, mais essentiel pour notre développement collectif et personnel. »


L’intelligence naturelle comprend notre intelligence émotionnelle

C’est notre capacité à comprendre, gérer et répondre aux émotions propres et celles des autres. Elle joue un rôle crucial dans notre bien-être personnel et professionnel. Elle est fondamentale pour la coopération, le leadership partagé et la résolution de conflits, des domaines où l’intelligence artificielle a encore beaucoup à apprendre. Cette forme d’intelligence va au-delà de la simple cognition. Elle inclut l’empathie, la régulation émotionnelle, l’utilisation des sentiments, l’écoute active, la reconnaissance de l’autre par un simple regard positif, la présence, stimulant la motivation personnelle et la capacité à naviguer dans des situations sociales complexes.

Alors, cultivons notre intelligence émotionnelle, nos singularités, améliorons nos relations, augmentons notre performance professionnelle au service du sens et construisons des communautés plus fortes et plus résilientes. C’est un aspect essentiel de l’humanité qui ne peut être pleinement répliqué par l’IA, finalement normative, ce qui souligne l’importance de continuer à développer cette compétence, même à l’ère de l’avancée technologique. A ma toute petite échelle, je m’inscris à côté de l’artificiel en tant que coach de chair et d’os, développeur d’intuition, d’intelligence émotionnelle, de ressenti, d’imperfection humaine salutaire et reste toujours plus persuadé que de toute façon, les réponses essentielles sont là, en chacun.e de nous.

Ce matin de mars, je quitte Pierre en le remerciant pour ce dialogue qui m’aura rappelé à notre devoir d’équilibriste vigilant. Je retourne, curieux, au spectacle de notre civilisation monde et de son évolution perpétuelle, où il n’y a plus qu’à mettre en œuvre les réponses que nous souhaitons donner à nos questionnements existentiels.   

Un grand merci à Pierre KHATTOU, membre fondateur de l’association IC@RE et chargé de projet « Social Numeris » chez CRIJ OCCITANIE, pour sa contribution à l’écriture de cet article et son enthousiasme communicatif. http://www.asso-icare.org

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